Paroles autour de la banlieue

Des mots du rejet

Je ne comprends plus ces populations des trains de banlieues, ces hommes qui se croient des hommes, et qui cependant sont réduits, par une pression qu’ils ne sentent pas, comme les fourmis, à l’usage qui en est fait.
De quoi remplissent-ils, quand ils sont libres, leurs absurdes petits dimanches ?

Antoine de Saint-Exupéry, Terre des hommes, 1939
Pauvre banlieue parisienne, paillasson devant la ville où chacun s’essuie les pieds, crache un bon coup, passe, qui songe à elle ? Personne.
Abrutie d’usines, gavée d’épandages, dépréciée, en loques…
Louis-Ferdinand Céline, Préface à Bezons à travers les âges, 1944
Et les meufs et les keufs dans le RER ! La banlieue, c’est pas rose la banlieue c’est morose !
Les Inconnus, C’est ton destin, 1991
Au pôle Nord, au pôle Sud, à l’équateur, l’homme s’acclimate partout, il n’y a qu’en banlieue qu’il ne s’acclimate pas.
Jean-Marie Gourio, Brèves de comptoir, 1996

Questionnement d’autochtones

J’avais honte d’habiter dans un HLM. Je trouvais ça moche. Du coup, je ne donnais pas ma véritable adresse à mes petits camarades. Disons que c’était tranquille, Arcueil…
Jean-Paul Gauthier, interview Libération 6 octobre 2006
Moi, ma famille est d’ici, je ne suis pas une vieille Arcueillaise mais dans ma tête, si. Je suis née à la porte d’Orléans.
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En fait mon quartier pour moi, c’est la banlieue, c’est surtout pas Paris.
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Mon quartier c’est ma rue, sinon c’est Paris, je vis dans ma maison, à Arcueil je m’y balade pas trop, j’y fais pas mes courses, il faudrait plus de temps, dimanche je préfère aller à Paris, Arcueil c’est triste le dimanche. /

Les luttes, contre Paris, contre l’occupant, contre la misère, la solidarité, les nouvelles constructions pour les ouvriers, la Cité Jardin. Y a vraiment de quoi être fière.
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Arcueil, c’est quoi ? C’est la banlieue, la banlieue Sud !
Mais une banlieue, ça n’a pas d’histoire, c’est juste une banlieue de quelque chose.
Habitants arcueillais, extraits d’un théâtre-forum, septembre 2000

A la question rituelle t’habites où ? et surtout, t’es d’où ? j’ai longtemps répondu : banlieusarde ou parisienne, ou de la proche banlieue, selon les circonstances et les interlocuteurs. Et même aussi d’origine savoyarde lorsque je travaillais en Province.
Ma ville, ce n’était pas Paris, c’est une tout autre Histoire.
Et aujourd’hui est-ce que je dirais, comme un habitant d’Agen ou de Concarneau, simplement : je suis d’Arcueil ?

Dominique Falcoz directrice du TdN

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